Un minimum de monde visible
pour ensemble de 24 musiciens (2013) | 22 minutes
(2.1.2.1, 2.2.2.0, 3 perc., pno, hp, 2.2.2.1)
Création le 11 janvier 2014, Amsterdam Concertgebouw
Ensemble intercontemporain, Pablo Heras-Casado, direction
[…] porque era un mínimo de mundo visible […]
JORGE LUIS BORGES
L'idée de la pièce est née lors de ma résidence à la Villa Kujoyama au Japon, en 2011.
Précisées sous l'ère Edo, deux des cinq routes historiques Gokaidô relient Tôkyô à Kyôto selon deux tracés distincts : le Tôkaidô longe le littoral alors que le Nakasendô chemine à travers les montagnes. Témoins d'une époque, Hiroshige, Eisen et Hokusai ont immortalisé ces routes dans des séries d'estampes ukiyo-e, permettant de visualiser les routes telles que les empruntaient les voyageurs au XIXème siècle. Organisées à cette époque en étapes et relais, elles ont aujourd'hui véritablement explosé en axes gigantesques drainant un trafic étourdissant.
L'organisation formelle de la pièce est régie par ces deux dimensions : l'étape et le parcours. L'incessant jeu de combinaisons et d'imbrications de petites entités musicales dessine une grande trajectoire qui surplombe la fragmentation.
La confrontation de témoins poétiques avec le contexte actuel, la résonance de leurs traces est ici métaphore. Si j'ai choisi de n'utiliser aucun élément directement issu de la tradition musicale japonaise, la dialectique est exprimée par le « niveau de survivance » d'un langage archaïque mélodique, filtré, diffracté, décanté et perçu au travers d'un discours implacable et corrosif. D'une cohabitation fragile jusqu'à son phagocytage et sa disparition.