Chauris ouvre le champs de résonance, jouant sur l'opposition duelle entre immobilité (répétition) et projection du son, registre grave et lumière des aigus auxquels Soulès donne l'éclat du métal. De l'élan presque lisztien à l'épure des dernières minutes, Soulès captive notre écoute, créant sous ses doigts ce phénomène de suspension sur lequel s'achève l'œuvre et qui nous étreint.
Forge sonore des graves, tension, magma roulant et éblouissements sont offerts par Lorenzo Soulès dans l'interprétation de la Sonate d'Yves Chauris.
Yves Chauris s’affirme en maître du miroitement, jouant sur l’irisation des timbres et la résonance chaloupée des deux pianos. La texture intranquille est soumise à de brusques déchirures et autant de reflets/remous d’une matière dont Matthias Pintscher révèle la magnificence.
Un concert marathon passionnant, que vient couronner la création mondiale pour deux pianos d’Yves Chauris.
Timbre, espace, matière, pourrait-on dire, pour embrasser d’une seule expression l’écriture pianistique subtile et singulière d’Yves Chauris. Blocs de pierre éminents, silences habités que semble répercuter la musique du compositeur. Dans le début de Mineral pianos, des éclats de matière s’entendent dans l’aigu du registre des deux pianos, impacts solaires dont les résonances, comme une ombre portée, glissent progressivement sur tout le clavier. L’écriture est comme aimantée par la sphère lumineuse des instruments où les sonorités cristallines entretenues par le jeu des deux pianistes sont mises en orbite. Elles continuent longtemps et obstinément de projeter leur éclat avant le geste éruptif des deux interprètes toujours solidaires. Ils investissent cette fois le médium-grave dans un épisode véhément qui tord le cou à la lumière et ponctue sans appel cette trajectoire dans le noir.
Avec une synergie exemplaire et cette appétence à faire jaillir de leur clavier couleurs et matières inouïes, les deux pianistes nous éblouissent dans cette interprétation totalement habitée de la nouvelle œuvre d’ Yves Chauris.
C’est la même émotion qu’on a ressentie en entendant la création mondiale de Yves Chauris, Mineral pianos. A partir de quelques notes égrenées à un déluge de notes et d’accords, Chauris a su cristalliser toute une gamme d’émotions bouleversantes. Ces trois amis pianistes ont réussi à être en parfaite osmose créatrice.
Umso poetischere Repetitionen mit viel Luft, scharfen Akzenten und wundersamen Aufpfropfungen.
Présences 2019 offrait l'occasion de découvrir un créateur chez qui chaque nouvelle œuvre est un objet très soigneusement élaboré et enthousiasmant.
Au piano ou à l'orchestre, le résultat produit une impression de naturel à la mesure de sa sophistication. Le compositeur jongle dans Circonstances de la nuit avec un tout simple motif diatonique, des résonances combinées, des attaques cinglantes, des masses sombres, et révèle un talent d'harmoniste que Nicolas Hodges met en relief grâce à un bel étagement des plans.
Why so quiet nous vaut un grand orchestre dont la mise en espace et en volume est rendue particulièrement saisissante par un Orchestre National de France qui relaie l'onde de choc initiale, faisant de la pièce une réaction en chaîne. Dans les deux cas, le sens de la courbe, de l'enveloppe et de la forme force l'admiration.
La pièce intense et concentrée sonde les mystères de la nuit, entre mouvance harmonique, résonances profondes et jaillissement de lumière : tel ce carillon aigu, sorte de cri-oiseau que le pianiste fait sonner de manière étonnante au début de la partition, avant d’investir le reste du clavier où se tisse progressivement la polyphonie. L’investissement du geste et les couleurs que l’interprète tire de son piano fascinent, conférant à cette trajectoire du rêve une aura poétique autant qu’énigmatique.
Porté par un imaginaire sonore étonnant, Chauris nous fait « voir » les trajectoires du son dans l’espace, de son attaque (déflagration) à sa chute (désinence). C’est ce que donne à entendre le chef muni d’un bâton de brigadier (celui du théâtre) avec son coup inaugural répercuté par les pierres entrechoquées des percussionnistes. La surprise est de taille et l’écoute aussitôt monopolisée. Les sons vivent, vibrent, vrillent selon leurs morphologies, leurs surgissements et la manière dont ils retombent, en glissades (celles des cuivres) ou en poussière (matière hérissée de pizzicati aux cordes). C’est une leçon de choses fantasmagorique, une expérience d’étrangeté dans un temps suspendu, à laquelle nous convie le compositeur et qui stimule notre propre imaginaire.
[...] Pour applaudir fortement la composition d’ Yves Chauris « Why so Quiet » ! Déflagrations, tremblements, crépitements, craquements, il organise l’espace des possibles et d’un trait efface tout pour réinventer un autre espace et nous surprendre. Une musique excitante et très visuelle ! On aime.
Yves Chauris y montre sa maîtrise souveraine de l’orchestre.
Carillonnement de l’extrême aigu invitant un au-delà étrange, vrombissement grave aux accents de tonnerre, vertige en spirale plongeant dans un cauchemar insidieux, glas d’une marche semi-funèbre, etc. Ouf, aucune toux du public n’ébrèche ce moment raffiné !
Du fait de sa perfection formelle, le Trio pour violon, clarinette et piano d'Yves Chauris nous plonge au cœur de ces enjeux. Cette pièce joue avec le temps et en abstrait un agrégat aussi brûlant que froid, aussi sonore que silencieux, dans lequel l'attention s'abîme – débouchant sur cet envers du présent que la pensée ignore.
[...] Une réussite quant à la mise en tension du temps et de l'espace, de l'événement et de la répétition, de la stase et de la direction, du son et du silence.
A n'en pas douter, Yves Chauris confirme qu'il est de ces jeunes forces en devenir avec lesquelles la musique devra compter.
Musique aux échos bruités et aux lignes ployantes, Other voices joue sur les émergences fluctuantes (cernes mélodiques ou jaillissement plus impulsif) de musiques stockées et filtrées par la mémoire. L’alliage des cordes et du sifflement très doux des interprètes confère un lissage et une sensualité du timbre rares : peut-être celle des shôs dans la musique raffinée du Gagaku dont l’étrange beauté semble ici rejaillir.
D’arbres, de ténèbres, de terre, tout en aplats d’harmonies délicates, sur fond desquelles des susurrements ténus, des vibrations fragiles prennent vie, est une véritable merveille, ce qui n’a pas échappé aux auditeurs avertis, nombreux à être venus féliciter le compositeur et les interprètes pour cette création.
Le compositeur [...] fait sortir la création du chaos, du minéral pour inventer un chant ailé, subtil, aux contours sonores faits de dentelle très fine. Magnifique, magique même.
Dans cette oeuvre captivante de bout en bout, Chauris met à l’oeuvre la fulgurance du geste qui projette le son et le propage dans un espace et un devenir toujours mouvants. Le soin du détail et la recherche de timbres rares confèrent sensualité et raffinement à un flux sonore extrêmement ductile et magistralement conduit.
Schon das subtil ausgearbeitete Werk des Franzosen Yves Chauris (“Why so quiet”) hatte, indem es die Zuhörer zwischen sechs Schlagzeugern und einem eminent farbigen Orchester gleichsam zu Teilen eines pulsierenden Klangkörpers marchte.
Yves Chauris hat „Why so quiet“ explizit für großes Orchester geschrieben, mit dem er tatsächlich sehr wirkungsvoll umgeht: weite Wellen organisiert. […] Das strömt und rauscht, glitzert und schwelgt in Raumklang-Wonnen. Überrascht fühlt man sich in der Meinung bestärkt, dass es doch eine genuin französische Kunst sensualistischer Suggestion gibt.
His well-received Un minimum de monde visible, a piece crammed with fresh ideas and original orchestral sonorities. It was the event of the evening.
[...] Ontpopte hij zich tot een volleerd klanktovenaar, die de stiel van fonkelende timbremengsels, onalledaagse speeltechnieken en fijnmazige texturen tot in de puntjes beheerst.
A huge success for the world premiere of a highly original new work by Yves Chauris — Un minimum de monde visible. Chauris probably needs the space of a large hall to come accross as it was meant. At the Concertgebouw you could hear everything, including the smallest sound or tick. Most exciting.
On dira beaucoup de bien d’Un minimum de monde visible d’Yves Chauris, pièce créée trois jours plus tôt au Concertgebouw d’Amsterdam par les mêmes interprètes, et qui révèle un compositeur soucieux de la couleur et prêt à provoquer l’écoute, c’est-à-dire à exiger beaucoup de son auditeur. [...] Il s’agit pour Yves Chauris de créer un espace, c’est-à-dire un climat, et pour ce faire le musicien dispose de cet outil essentiel qu’est le temps.
The work with greatest immediacy was that of Yves Chauris, at 30 the youngest of the four. His piano concerto ...solitude, récif, étoile... is accompanied by just wind and percussion instruments. Brilliantly executed by soloist Jean-Frédéric Neuburger, it glittered and growled at the extremes of the keyboard and, in a final tryst with the soprano saxophone, fell still.
[...] In a single movement, and lasting some fifteen minutes, this impressive work (even more impressive when one remember that it was written by a twenty-two year old composer) integrates soloist and orchestra in a pleasing and individual fashion, finding room both for a cadenza-like passage for the soloist of considerable beauty and delicacy, as well as for some lovely dialogue between clarinet and piano at the work’s close, alongside some rhythmically hard-driven passages with a strong sense of forward movement (albeit a momentum easily tempted, as it were, into side ways and pauses).
Chauris is recognised in France as one of the more interesting composers of his generation and has already (at thirty) been much garlanded with prizes and fellowships. It wasn’t hard to see/hear why.
[...]cette page d’une dizaine de minutes travaille sur les “ondulations” que suggère son titre anglais. De ce point de vue, les quelques mots placés en exergue - “Un son trouble la surface du miroir. L’ondulation apparaît, le murmure se propage, la rumeur croît, enfle, se précipite, s’abîme.” - tiennent lieu sinon de programme du moins de fil conducteur : à l’issue d’un round d’observation, durant lequel l’indifférenciation entre les trois instruments s’estompe peu à peu, la vitesse et la densité s’accroissent, suivant un déroulement dramatiquement efficace.
C’est [...] Yves Chauris qui donne l’éclat de la jeunesse avec une partition écrite au conservatoire en 2002. Ce ne sont que l’urgence de l’expression, l’emportement de l’espoir, la volonté de trouver un chemin qui donnent l’état de ...solitude, récif, étoile..., page inspirée, construite, envolée. Créateur discret, exigeant, honnête et soucieux, Yves Chauris sera écouté.